Alexandre Blok, poète de l’Age d’argent. Александр Блок

Alexandre Blok était, dit-on, un bel homme aux gestes lents, aux yeux graves et à la voix profonde.

Poète emblématique de l’Age d’argent, il écrivait comme un musicien compose – en entendant des voix, des mélodies, des chants…

Alexandre Blok est né en 1880, d’un père professeur de droit à l’Université de Varsovie et d’une mère écrivain et traductrice.

Après la séparation de ses parents, il passe son enfance dans la famille de sa mère, entre St.Pétersbourg et une résidence secondaire à Chakhmatovo près de Moscou. Son grand-père maternel, botaniste, est recteur d’université. Pendant ses études de lettres à l’Université de Saint-Pétersbourg, en 1903, il se marie avec Lioubov Mendeleïeva, la fille de l’illustre chimiste Dmitri Mendeleïev. Cette même année, il commence à publier ses premiers poèmes dans la revue de Merejkovski Voie nouvelle, encouragé par ses nouveaux amis, poètes Andreï Bély et Valériï Brussov.

Dans son autobiographie, le poète dit que « tous les poèmes depuis 1897 peuvent être considérés comme le journal de sa vie intérieure ».

Alexandre Blok
Alexandre Blok – Александр Блок

Alexandre Blok s’inscrit dans la lignée des poètes-symbolistes

Eux-mêmes inspirés par le poète et théologien Vladimir Solovjev que, très jeune, il rencontre brièvement.

En 1904 sort son premier recueil de poèmes lyriques La Belle Dame (« Стихи о Прекрасной Даме »), qui forme le premier volume d’une trilogie. Transposant son amour humain en expérience mystique, il voit en sa fiancée la Belle Dame, la Vierge des portes célestes.

Le second volume est constitué de plusieurs cycles dont La Ville – Город – et Le masque de neige – Снежная маска – sont les plus connus. Ce volume marque sa désillusion, la retombée dans un monde lourd en catastrophes, où raillerie et conflits traduisent la vulgarité de la vie. D’après Blok, « la révolution 1905 lui a fait prendre de la distance avec le mysticisme enfantin ». C’est le thème social qui prévaut dans son œuvre de cette période (même s’il était déjà présent un peu avant, notamment dans le cycle Carrefours). La monstruosité de la ville, la condition des ouvriers. Le thème de la Patrie est désormais omniprésent dans ses écrits. La Russie, comme la Belle Dame, est une entité mystique (le Châtiment, 1911, les Scythes 1918).

Peu à peu le mysticisme se change en ironie et en pamplets

Notamment dans les drames « lyriques » (la Baraque de foire 1906, la Rose et la Croix 1912). Dans ses articles des années 1908-1917, il s’attarde sur les problématiques de la relation entre le peuple et l’intelligentsia, la Russie et l’Occident, il réfléchit sur l’histoire de la culture et de son état actuel, sur le progrès

Le troisième volume, également en plusieurs cycles est le plus fort, le plus classique aussi. Il annonce la destinée tragique de la Russie. Blok tente, à travers ce dernier volume, de trouver sa propre place entre ses élans mystiques, ses idéaux, et le matérialisme de l’existence.

maison d'Alexandre Blok - Музей-усадьба Александра Блока "Шахматово"
Maison-Musée d’Alexandre Blok à Chakhmatovo  – Музей-усадьба Александра Блока в Шахматово

Blok était de ces intellectuels qui ont accepté la révolution.

Cet évènement lui a inspiré les Douze (1918), épopée de douze gardes rouges, à l’image des douze apôtres, résonnant de bruits, de musique et de chants populaires, et annonçant la chute du vieil univers. La révolution née des forces de la nature, l’image de fille de joie Kat’ka comme symbole de la Russie (tu as joué avec des officiers, joue donc avec des simples soldats maintenant !)

Dans ses écrits des années 1917-1918 il appelait l’intelligentsia à la construction d’une nouvelle culture « synthétique ». Ce sont ses articles Intelligentsia et révolution, Art et révolution, Lettre sur le théâtre et d’autres, dans lesquels Blok est resté fidèle à ses idées : la force créatrice et transformatrice de l’art, l’art universel qui nivèle la différence entre le créateur et le peuple.

Alexandre Blok en 1907
Alexandre Blok en 1907

La révolution, dernier espoir, sera aussi le dernier enchantement de cet homme

Lui qui a rêvé d’absolu sur terre (le Naufrage de l’humanisme, 1919) meurt en 1921, ayant tenté toute sa vie – c’est-à-dire dans toute son oeuvre – de transmettre ses visions mystiques de l‘autre monde, qu’il entendait comme un musicien ou un mystique.

Ночь, улица, фонарь, аптека,                          La nuit, la rue, le réverbère, la pharmacie,

Бессмысленный и тусклый свет.                    Une lumière absurde et blême.

Живи ещё хоть четверть века –                       Vis même encore  un quart de siècle,

Всё будет так. Исхода нет.                                Tout sera ainsi. Pas d’issue.

 

Умрёшь – начнёшь опять сначала                  Tu mourras – tu recommenceras tout

И повторится всё, как встарь:                          Et tout se répétera comme jadis :

Ночь, ледяная рябь канала,                             La nuit, les ondulations glacées du canal,

Аптека, улица, фонарь.                                     La pharmacie, la rue, le réverbère.

10 октября 1912

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4 Commentaires

  1. Merci pour ce partage et vos vidéos Ania. Je suis régulièrement vos vidéos, потому что я студент и учу русский язык на филологическом факультете (pardon si je fais quelque fautes, ça ne fait pas longtemps que j’étudie le russe). Je connais ce poème par cœur car je l’ai étudié. Merci pour ce partage et bon courage dans votre démarche. J’essaie également de rapprocher nos deux pays (même si ce n’est pas toujours facile).

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    • Спасибо, Фредерик! Удачи Вам!

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  2. Très intéressant. C’est vrai qu’il est important de connaître le contexte culturo-idéologique pour apprendre une langue

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    • Tout-à-fait !

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